Chant d'hiver

Chant d'hiver d'Otar Iosseliani (Fr) °
Le temps passe et Otar n'a plus grand chose à nous raconter. Bien sûr on retrouve son Paris rêvé mais la magie n'opère plus. Il suit quelques clochards pourchassés par la police avec des voleuse en rollers, un violoneux, un harmonica. Rufus a l'air hébété, et son collègue collectionneur de crânes à côté de la plaque. Bref une grosse, grosse déception. Mais Iosseliani reste le réalisateur qui a placé "La chasse aux papillons' en 14 èmè position dans le Daniloris' classement, on l'aimera toujours.

La fameuse tragédie du riche juif de malte

La fameuse tragédie du riche juif de malte de Christopher Marlowe (L'épée de bois : cartoucherie) mise en scène de Bernard Sorel °°°
Contemporain de Shakespeare Marlowe a écrit cette pièce violemment antisémite  cinq ans avant la "marchand de Venise" qui n'était pas mal non plus à ce propos. Certes elle l'est mais l'auteur n'épargne personne, les catholiques sont tout aussi ignobles, comme les gouverneurs de l'île. Personne ne trouve grâce à ses yeux même s'il charge beaucoup son héros déjà " la caricature du juif". Cette pièce dans son horreur est l'écho de notre temps où sous prétexte de religion, on ne pense qu'à l'argent, qu'au profit. On écrase son ami pour empocher le magot. La mise en scène est brillante, inspirée. Une fois que l'on a fait la part des choses, époque différente, les rapports autres, on peut réellement apprécier, le discours sous-jacent bien plus dérangeant encore et bénéfique à la réflexion. Les acteurs sont formidables avec une articulation impeccable qui permet immédiatement  d'entrer dans un texte pas toujours accessible et qui devient limpide grâce à ce travail remarquable ( ce n'est pas le cas partout) Cela remue et engage la polémique. Une très bonne soirée

Les cowboys

 Les cowboys de Thomas Bidegain ( Fr) °°°° 1 h 44
Incroyable premier film, magnifiquement écrit du début jusqu'à la fin, sans fausse note, sans pathos, sans rajout inutile, sans dialogue qui gâche l'émotion. L'histoire d'un père qui part à la recherche de sa fille peut-être kidnappée par des intégristes. Une quête sans faille absolue, sans relâche, secondée par un fils superbe ( Finnegan Oldfield). François Damiens endosse ce rôle et nous file la chair de poule, il est prodigieux. Pour lui les arabes d'aujourd'hui sont les indiens d'hier, il est impitoyable, féroce et désarmé. Son fils ira jusqu'au bout, jusqu'à cette scène finale magnifique et seule possible. Courez-y, c'est une obligation.

Les suffragettes

Les suffragettes de Sarah Gavron (G.B) °°° 1h45
Quand on voit par où ces femmes admirables sont passées, on pleure devant le taux d'abstention aux futures élections quel qu'elles soient d'ailleurs. C'était il y a un siècle (le droit des votes des femmes en France 44, en Suisse 71!)  et cela nous semble une éternité. Les suffragettes , rien que le nom porte à sourire, mais sous ce nom nombre d'entre elles ont souffert le martyre. Le film s'appuie sur la vraie misère de l'époque ( viols des employées impunis, le mari qui a tous les droits même celui de faire adopter ses enfants parce qu'il est incapable de les élever, sans le consentement de la mère ...) Ce sont les mêmes combats que celui de l'avortement, du mariage pour tous. Il montre aussi la violence policière sur des femmes désarmées et cette résistance incroyable. Meryl Streep fait un apparition remarquée dans le film jouant Emmeline Pankhurst, mais Carey Mulligan, Helena Bonham Carter, Anne-Marie Duff et les autres sont toutes parfaites. A voir sans hésitation.

Macbeth

 Macbeth de Justin Kurzel (U.S) ° 1h53
Le symbole du mal sur scène, c'est Michael Fassbinder qui s'y colle. Il devient un héros romantique qu'accentuent les décors grandioses ou ridicules , c'est selon. On ne retrouve pas la bête qui agit sans réfléchir, qui veut absolument faire concorder les prophéties avec la réalité, vers une quête sanguinaire du pouvoir sans fin. Etrangement c'est Marion Cotillard, inspiratrice du crime, qui s'en sort grandie, elle est parfaite dans la hargne et dans le regret ( la douleur, on le savait déjà). A vos risques ....

Hunger games

       Hunger games de Francis Lawrence (U.S) °° 2h17
Voir ce film juste après le labyrinthe 2, donne l'impression de revenir au temps des cinémas permanents. C'est exactement  la même histoire, une sorte de parcours truffé d'obstacles qui servent à éliminer les personnages les uns après les autres. Ceci dit, le réalisateur nous évite des combats qui n'en finissent pas, des dialogues cuculs et par contre nous interroge sur le poids des images qu'on nous sert toute la journée dans les médias et dont il faut se méfier. Bref il y a les bons, il y a les méchants, c'est rassurant. Sortez juste avant le fin débile et restez sur une histoire plutôt bien ficelée.

Je suis un soldat

Je suis un soldat de Laurent Larivière (Fr) °°° 1h37
On compare ce film à un des frères Dardenne, il ne le faut pas. Peut-être parce que cela se passe dans le Nord. C'est un film d'un auteur: Larivière. On ne s'intéresse pas à la misère des gens mais on suit une femme déchue, seule qui est obligée de revenir dans sa famille pour sortir la tête de l'eau. Les rapports familiaux sont vraiment réussis et durs quand on traîne sa honte. Incroyable Louise Bourgoin, elle m'a totalement secouée, moi qui ne la supportait pas. Elle va travailler dans un chenil, lieu hyper cinégénique avec une ordure ordinaire Jean-Jacques Anglade parfait. Quitter un enfer pour un autre. Et j'ai redécouvert la chanson de Johnny "Je suis un soldat" qui illustre parfaitement sa lutte. C'est un film magnifique. Allez-y.

El club

 El club de Pablo Larrain ( Chili) °° 1h38
Ce club est plutôt un ramassis de vieux prêtres coupables de pédophilie qui vont se serrer les coudes pour s'en sortir. Quand arrive un nouveau condamné par l'église il est suivi par une de ces victimes qui hurle sa rage devant leur maison. Et pourtant cette rage ne nous semble pas l'affecté autant qu'il ne le faudrait. Le nouvel arrivant se suicide pour échapper à sa litanie. Puis l'histoire se centre sur le complot que vont fomenter ces fous pour vivre ensemble longtemps avec la complicité de l'église et d'une sœur elle aussi fautive. Bref c'est glauque, immoral, intéressant. Tous les personnages sont moches et méchants, ils n'ont rien qui les sauve, dans ce Chili gris et triste comme l'image feutrée de bleue qu'a choisie de nous offrir l'auteur. Pourquoi pas. 

Nous 3 ou rien

 Nous trois ou rien de Kheiron (Fr) °° 1h42
C'est un film infiniment sympathique. Il faut reconnaître que Kheiron ose. Parler des dictatures du Shah et de Khomeyni sur le ton du grand guignol il fallait le faire, chapeau. Tous ses comédiens de la période iranienne sont formidables, on s'amuse alors que tout est tragédie ! La prison, la lutte, la révolution, la fuite du pays. Arrivés à Pierrefitte le ton reste le même, ses acteurs de banlieue, mamas noires et femmes maghrébines font pisser de rire ( moins les ados plus caricaturaux) Bien sûr on nage dans l'angélisme, peut-être plus possible à cette époque que maintenant où les banlieues se sont durcies. Mais surtout ne boudons pas le plaisir que nous offre ce film surtout en ce lendemain de drame. Oui le brassage communautaire est possible, les trottoirs du X ème et du XI ème le prouvent qui ont défié les "crevures". A voir.